Injections, infusions and porridge

PikhostoIl est à peine midi, il me reste quelques heures avant de prendre mon bus de retour pour Makassar. Mais pour une fois, j’écoute mon petit ange gardien –et mon estomac– qui me conseillent de rentrer à l’hôtel. Monter les douze marches qui me séparent de ma chambre est un véritable supplice, il semblerait que je manque de force.

La turista en Asie, c’est un rite de passage, pas de quoi en faire un article. Si, si la rave-party dans mon estomac dure depuis 5 nuits et 4 jours, si l’infection s’avère potentiellement mortelle et potentiellement pourrisseuse de vacances.

Fervente fan de découvertes et amoureuse de tout ce que je ne connais pas, j’ai la joie d’enchaîner mon escapade avec un séjour à l’hôpital, à m’empiffrer de perfs et de porridge. Un régal.

Fièvre typhoïdale, un bonheur.

 

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Départ de Sulawesi, 2 de tension, -6kg. Mais la vue est magnifique.

Rantepao’s market

MarketplaceUn incontournable au Pays Toraja. Tu m’étonnes. Plus de buffles qu’on n’en verra jamais, de toutes les couleurs et toutes les formes, des cochons ficelés, tous voués à être sacrifiés. Et croqués. On croise des familles très pauvres qui négocient des buffles à plus de 5000$ pour des funérailles. Les cérémonies n’ont pas de prix ici, même s’il faut vendre ses terres pour pouvoir payer les sacrifices.

Après tout ce sang la partie fruits et légumes est un bonheur, on aurait presque faim avec tout ça. Ça vaut bien un gado-gado, après quatre jours de riz nature.

 

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Wednesday bloody Wednesday

SacrificesRien que pour le titre de l’article, j’aurais dù y aller un dimanche.

Après deux nuits en enfer, je change d’hôtel pour une version moins glauque et un brin plus clean, espérant pouvoir enfin passer une bonne nuit. Mon estomac et ses ovnis en décideront autrement. Au beau milieu de la nuit, je pense rapatriement, hôpital et autres décisions raisonnables.

Je me réveille avec la vitalité d’une grand-mère borgne débile de 92 ans, j’oublie les ovnis et je rejoins Samuel pour ma dernière journée au Pays Toraja, la plus attendue de mon séjour. Nous sommes invités à une cérémonie funéraire.

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Tout juste le temps de discuter avec l’un des convives, nous nous rendons sur la place des sacrifices. Un gamin d’une dizaine d’années arrive avec un buffle et, en une fraction de seconde, il lui lève la tête avec la main gauche et lui tranche la gorge en un coup de machette, avec l’autre main. Le buffle fait deux pas avant de s’écrouler sur le sol. Avant même qu’il n’ai cessé de respirer, les hommes viennent lui enlever la peau et le dépecer pour en partager les pièces de viande.

Par la suite, un buffle, shlack, boum, un autre, shlack, boum, un autre… Six d’entre eux y passeront, en sacrifices pour les dieux. Les invités sont euphoriques, l’odeur du sang se fait de plus en plus forte, les buffles agonisent au sol, jusqu’au dernier qui, ivre de douleur, charge son agresseur, puis le public, faisant un blessé avant de mourir.

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Les invités arrivent pour s’installer dans le salon et se faire offrir du thé. Ils restent un instant puis laissent leur place aux invités suivant et ainsi de suite toute la journée.

Cette boucherie à ciel ouvert commence à me donner la nausée, Samuel m’emmène donc voir les sacrifices de cochons à l’arrière. Un beau travail à la chaîne. Ils se font trancher, puis on lui enlève l’estomac, et enfin on lui brûle la peau au chalumeau. Pendant ce temps, les autres petits cochons font la queue, attendant patiemment leur tour en regardant leur copains se faire cuisiner.

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Il est temps de partir, les ovnis reviennent.

Toraja country in motorcycle

TorajacountryIl n’y a pas que des têtes de morts enfouies au fond des grottes, au pays Toraja. Il y a aussi les plus belles rizières de Sulawesi. Bien différentes de celles de Borobudur et de Bali, et tout aussi splendides.

Sur la route les enfants crient « bule, bule« , et hurlent si je m’avise de les prendre en photo, les buffles se font promener comme on promène son chien, les routes sont magnifiques et chahutées –c’est plus sympa ça remue mes ovnis de l’estomac– et au fond les nuages menacent jusqu’à exploser, nous laissant finir le trajet sous des trombes d’eau, équipés d’un k-way… pour deux.

 

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The culture of death

TorajavillagesEst-ce que ce voyage éprouvant dans des conditions extrêmes –non, je n’exagère pas– en valait la peine ? Oui. Est-ce que le Pays Toraja aurait été plus beau sans la rave-party dans mon estomac ? Sans doute, oui.

Les Torajas, c’est un peuple passionnant. Leur vie tourne autour de la mort. Lorsque l’un des leurs décède, ils le considèrent comme malade et le gardent dans une pièce qui lui est réservée dans leur maison traditionnelle, le temps de réunir toute la famille –qui peut venir de Sumatra, de Papouasie comme d’Australie– et tous les fonds nécessaires pour l’organisation des funérailles. Ça peut durer parfois plus d’un an. Les funérailles se déroulent en plusieurs parties. Il y a la messe, les sacrifices, puis la cérémonie où l’on reçoit les invités, et enfin on place le cercueil dans le tombeau familial. Ce dernier peut-être placé dans une grotte, creusé dans une montagne ou dans un rocher, ou encore accroché sur une falaise ou, pour les bébés, creusé dans le tronc d’un arbre sacré.

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C’est en moto que Samuel* –mon guide- me fait découvrir la région sous son plus beau jour. On commencera par le célèbre village de Ke’te Ketsu, pour remonter vers Bori, Lempo et pleins d’autres noms de villages qui ne vous parlent absolument pas. On y croise des crânes de bébés morts, des ossements éparpillés, des effigies angoissantes et des offrandes en tout genre -cigarettes, fleurs, parapluie (?)-.

Les découvertes n’en finissent pas et les locaux sont tous aussi heureux de voir des touristes s’intéresser à leur culture. On est invité à boire le café chez des amis de Sam, je visite la pièce sacrée de chaque maison que l’on croise –non je ne parle pas de religion là. Oui je parle toujours des ovnis dans mon estomac-. Le pauvre essaie de me faire découvrir des restaurants pleins de charme, dans lesquels manger trois cuillères de riz relèvera d’une épreuve pour moi.

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Au bord des rizières, j’entends les moustiques rigoler en sentant le repealant sur ma peau. « On s’en fout, le repealant, on le boit aussi. Alors, ça fait mal, hein ? » C’est pas grave, ils ont sûrement pas le paluds, c’est pas grave, ils ont sûrement pas le paluds.

Après une journée à Sulawesi, je suis fin prête pour le casting de Koh Lanta, et bientôt pour celui des modèles Elite, puisqu’au rythme où je vais, à la fin de la semaine, je devrais peser 40kgs.

*Guide franco/anglophone à recommander : samueltoraya@yahoo.co.id

 

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From Jakarta to Rantepao

NartisplacePour mon premier trip solo en Indonésie, j’aurai pu choisir les Gilis, Ubud ou encore le Lake Toba. Mais si ç’avait été le cas, je n’aurais sans doute pas eu la chance de voir ces dizaines de moustiques différents me piquer -des rouges, des noirs, des poilus, pour certains atteints du paluds-, je n’aurai pas pu profiter d’une province où la saison sèche n’existe pas –en tongs et en moto, c’est mieux-, et je n’aurai pas pu perdre 6kg dans les toilettes les plus glauques de Sulawesi. C’est pour ça que j’ai choisi de m’envoler pour 5 jours au Pays Toraja.

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Le Pays Toraja, de la maison, c’est trois taxis, 2h de vol, 8h de bus et quelques heures d’attente -interminables, étant donné mes conditions physiques-. Oui, j’ai la belle surprise de réaliser que mon estomac avait été transformé en discothèque pour extraterrestre masochistes pendant le trajet. C’est rien, ils ont dû mettre du chien pas frais dans mes nems au resto, hier soir.

Voyage solo, certes, mais je ne reste pas seule longtemps. Arrivée à l’aéroport de Jak, je me fais offrir un café. Dans l’avion, une vieille dame m’offre des gâteaux. A Makassar, c’est une ribambelle de gamins qui me proposent une partie de badminton en attendant le bus.

Et une fois dans le bus, une jolie rencontre.

Narti a 22 ans, étudiante en médecine, elle va rejoindre son mari pour le week-end. La route est longue, on a le temps de faire connaissance, et elle me propose de passer la nuit chez elle -pour m’éviter de débarquer seule avec mon sac à dos, de nuit dans une ville inconnue-.

Nous descendons donc à Makale, au sud du Pays Toraja. J’y rencontre son adorable mari et sa mère, qui m’accueillent tout comme si j’étais de la famille. C’est parti pour une nuit chez l’habitant comme les vrais, avec du poisson grillé au p’tit déj et un seau d’eau en guise de chasse d’eau, robinet et pomme de douche.

Selamat datang !

 

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